[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]En mars 2012, quatre lycéens s’étaient réunis au bord d’un lac à Bazas pour faire des grillades. La soirée s’est terminée dans le sang.
Ils avaient décidé de se retrouver sur les berges du lac Saint-Michel à Bazas. Avec un feu de camp, des grillades et quelques bières au programme. Mais le 31 mars 2012, la soirée festive en pleine nature de quatre élèves du lycée professionnel agricole de Bazas a pris une tournure dramatique. L’un d’eux, Samuel Labedan, Normand de 20 ans, n’en est pas reparti vivant.
Le pourquoi du comment
Depuis hier matin, Xavier Guiraudon, 35 ans, est jugé par la cour d’assises de la Gironde, à Bordeaux, pour le meurtre de Samuel Labedan et pour des violences aggravées. À ses côtés dans le box, Alexandre Lacheteau, 27 ans, comparaît quant à lui pour des violences aggravées. Les juges en sont rapidement venus aux faits, hier afin de comprendre le pourquoi du comment.
Ce soir-là, peu de temps après leur arrivée, les quatre jeunes ont été apostrophés par ces deux pêcheurs qui leur ont demandé de faire moins de bruit afin de ne pas faire fuir le poisson. Ils ont tout de suite baissé le ton et le son. À la nuit tombée, les mêmes « voisins » leur ont ordonné d’éteindre leurs lampes de poche. À nouveau, ils se sont exécutés. Et l’incident paraissait clos.
Mais les jeunes lycéens se sont soudain sentis pris en tenaille par les deux pêcheurs qui sont arrivés de part et d’autre du lac avec l’envie d’en découdre. Jocelyn, l’un des jeunes a été frappé sans sommation avec un bâton par l’accusé. « J’étais groggy. » Puis Xavier Guiraudon a pris son couteau dont il a menacé l’assistance. Comme les autres, Théo ne voulait pas d’embrouille et Charles-Henri a rendu les coups donnés par Alexandre Lacheteau qui était le plus véhément.
Pas de témoin du coup
À un moment, dans l’échauffourée, Samuel Labedan est tombé, ensanglanté. Il est décédé sur place malgré l’intervention des secours et les points de compression tentés par ses copains. Les enquêteurs ont d’abord pensé qu’il avait été mortellement blessé par une branche. Mais l’autopsie a révélé qu’il était mort d’un coup de couteau, planté à hauteur du thorax.
Le couteau a été retrouvé. C’est le poignard de
pêche de Xavier Guiraudon et il était maculé du sang de la victime. « Mais personne n’est véritablement le témoin oculaire du coup de couteau mortel », résume d’emblée le président Christian Lauqué qui soulève là toute la difficulté et l’enjeu du procès qui se tient jusqu’à mercredi.
« Je ne me vois pas en train de faire ça », plaide Xavier Guiraudon. L’accusé offre aux jurés un visage lisse et impassible sur lequel semblent glisser souvenirs et émotions. Il se remémore parfaitement certaines scènes et beaucoup moins d’autres. « C’est singulier », s’étonne le président. « Vous avez des épisodes d’amnésie très très ponctuels. » La cour sonde son parcours qui tient pour lui en peu de mots. L’internat pour fuir le divorce de ses parents, l’ostréiculture comme métier puis le paysagisme. Son permis de conduire suspendu, retiré puis annulé pour de récidivantes conduites en état d’ivresse. Les problèmes d’entente et d’attente avec ses petites amies évanescentes. Et puis un accident de quad en 2007 qui l’a laissé handicapé.
Alors la
pêche à la carpe occupe toutes ses journées. Toutes ses pensées. « C’est une forme de liberté, il n’y a plus de norme. On peut manger avec les doigts, boire de l’alcool à outrance, marcher pieds nus. »
L’hommage d’un père
Alexandre Lacheteau comparaît libre. Moustache et regard tombants, il semble davantage concerné par les débats. Tente de timides coups d’œil vers le banc des parties civiles, toute une famille sobre et digne, serrée dans la douleur. Ce soir-là, quand les jeunes ont éteint leur lampe de poche et ont répondu « de rien » à son merci, il a compris qu’on l’insultait. Il a vu rouge.
« Vous êtes en train de nous dire que ce jeune est mort car vous avez cru entendre une insulte qui n’a même pas été proférée », gronde le président. Alors les juges se concentrent sur la victime. Regardent des photos, écoutent son père qui s’approche timidement à la barre.
Avec des mots simples et beaucoup de retenue, il décrit un fils enjoué, sociable, avec ses amis comme avec les personnes âgées, sportif, aimant la nature d’où son BTA. « Je suis en admiration devant tout ce qu’il a fait pendant ses vingt ans. Moi j’ai trois fois sa vie et je n’ai pas le sentiment d’en avoir fait le tiers. C’est une grande perte car il était d’une grande richesse de cœur. »
Source: Journal Sud-Ouest
Sujet: Une partie de pêche se fini dans un bain de sang 
Dim 8 Jan - 19:35
